Les clichés ou lieux communs sont des éléments récurrents qui, à force d’être lus (dans le cas des romances) (puisqu’on ne parle pas ici de la reproduction saisonnière des galinettes cendrées), intègrent des codes qui, eux-mêmes, finissent par définir le genre. (Parfois, je me transforme en pseudo-wikipedia)

Personnellement, je n’ai absolument rien contre les clichés. S’ils le sont, c’est parce qu’ils contiennent forcément une part de vérité. Comme le dit le fameux dicton, qui peut être lui-même considéré comme un cliché (magnifique mise en abîme de ma part de la notion de cliché) (si si, tu peux applaudir, ne sois pas timide) : il n’y a pas de fumée sans feu. Un cliché ne l’est que parce qu’on lui permet de l’être. C’est l’appréciation d’une situation qui pousse d’autres personnes à la reprendre à leur compte et ainsi de suite.

Par exemple, prenons Kelly et le dino porn. Le héros est bien souvent un T-Rex. Non, alors je n’en sais rien en réalité car je n’ai jamais lu de dino porn, mais ça va servir mon propos puisqu’on va se dire que le T-Rex est à la préhistoire ce que le bad boy est à la romance. Je vais arrêter là cette comparaison parce que je sens que je vais m’enliser, mais je ne pouvais pas ne pas mentionner le dino porn, c’est devenu une tradition. Ou, pour creuser un peu plus la mise en abîme : c’est devenu un cliché dans mes articles. Tu as vu comme je retombe bien sur mes pieds ?

Le souci avec les clichés n’est pas tant qu’ils le soient, mais leur sur-abondance dans une littérature qui, à force de répéter les mêmes schémas, tourne en rond et s’auto-alimente en circuit fermé. Si tu es lecteur-lectrice de romances du genre au point d’en dégommer plusieurs par semaine, les clichés, tu en manges autant que The Rock dévore des protéines à toute heure de la journée et de la nuit. Et le risque devient bien entendu de se lasser.

Comme pour tout, le cliché est, à mon avis, à consommer avec modération. Que l’auteur-e s’approprie un cliché vu, revu et rerevu, pourquoi pas ? Nous le faisons tous, consciemment ou non, à un moment. Puisque je rappelle que personne n’invente jamais rien : nous nous inspirons tous de notre contexte sociétal et, fatalement, ça a des conséquences sur la production littéraire de manière générale. Mais qu’une romance ne soit qu’une suite de clichés conduit à une overdose générale qui pourrait, à terme, tuer le genre. Ou le figer au point de devoir ensuite en passer par une révolution. Ce qui ne me dérangerait pas puisque je reconnais volontiers que, parfois, seule une révolte et un changement radical peuvent faire avancer les choses.

Le cliché que j’estime efficace est celui qui est utilisé intelligemment et ne sert pas uniquement de prétexte à remplir une histoire d’éléments qui ont fait leurs preuves mais ont l’air de tomber, pardon my french, comme un poil de couille dans le potage.

  • Dans les romances historiques, le guerrier a souvent eu le nez cassé plusieurs fois mais ça ajoute à son charme.
  • Dans les romances contemporaines, le héros est souvent un bad boy et l’héroïne une sage demoiselle pure et innocente qui va réussir à le canaliser.
  • Dans les romances d’urban fantasy, le héros est souvent un vampire disco à l’air constipé. Ou alors c’est juste dans Twilight, je dois vérifier.
  • Dans les romances MM, un des héros est souvent une caricature gay et quand on visualise son look, on a envie de se crever les yeux avec des goupillons de biberons.
  • Dans les romances dino porn, l’héroïne s’appelle souvent Kelly. Ou alors c’était dans Beverly Hills 90210, parfois je mélange tout.
  • Dans les romances young adult, l’héroïne est souvent magnifique sans en avoir aucune idée et tous les garçons sont attirés par elle.
  • Dans les romances new adult, le héros est souvent mystérieux et traîne plus de casseroles qu’une deudeuche lors d’un mariage bucolique.
  • Dans les romances érotiques, l’héroïne est souvent vierge devient la reine de la fellation dès la première tentative.

En bref (comme si je savais faire bref), on les retrouve dans chaque type de romance. Mais ça vaut aussi pour les autres genres, je pense notamment au flic de polar divorcé, alcoolique, bourru et qui a du mal à respecter les consignes de ses supérieurs. Mais comme toujours, je préfère parler de ce que je connais le mieux et ce ne sont donc pas les ouvrages philosophique traitant de la place des cultures tribales dans l’expansion éthique des bracelets de l’amitié.

Je suis comme tout le monde, j’ai mes « plaisirs coupables » (et non, je ne parle pas de plaisirs censurés et interdits aux moins de 18 ans) et j’aime certains clichés. Oui, mais j’aime qu’ils soient bien menés. Qu’ils servent un objectif en particulier et ne soient pas présents dans l’histoire juste pour le decorum. Qu’ils soient adaptés au style de l’auteur-e et que ce dernier leur apporte quelque chose. Qu’ils n’y en ait pas 82 à la chaîne dans le roman de 300 pages que je lis. Et bien sûr, on revient toujours à cette histoire qui guide ma vie à présent : il faut qu’ils soient en accord avec mes valeurs.

Par exemple, dans une romance érotique, l’idée que la femme ne puisse pas avoir un orgasme sans l’aide de l’homme, ça a le don de me déclencher des tics faciaux nerveux qui donnent l’impression que je reviens d’un déploiement en Afghanistan avec un PTSD de force 10.

Mais globalement, je n’ai rien contre les clichés. J’en use moi-même sans scrupules lorsque je suis convaincue que ça colle avec l’histoire que j’écris. Mes bêtas-lectrices sont de toute façon là pour me dire si je suis allée trop loin. Je travaille avec elle justement parce qu’elles sont aussi de grandes lectrices et que leur vision des choses correspond à la mienne sur le sujet.

Alors des clichés, oui, mais bien dosés et bien menés. Et toi, ces clichés, tu en penses quoi ? On peut en parler sur le groupe Facebook, viens, on a des marshmallows et du beurre de cacahuètes.