Traînant dans le milieu éditorial depuis quelques années maintenant, il y a des sujets de réflexion qui me reviennent régulièrement et parmi eux, celui de la case.

Les éditeurs, les commerciaux, les libraires et même parfois les lecteurs : tous veulent souvent ranger les auteurs dans des cases. En France en particulier, on aime que les auteurs restent bien à leur place. Ça ferait désordre qu’ils s’amusent à écrire dans plusieurs genres, non ?

Je lis de tout, vraiment de tout. Romance, thriller, témoignage, blanche, young adult, fantasy, développement personnel, poésie, dino porn (non je déconne, toujours pas), et j’ai envie d’écrire de tout également. Mais on me demande de rester à ma place.

Les naïfs.

Non, sérieusement, à quel moment les professionnels du milieu se sont dit que la création, l’inspiration et donc, l’écriture, pouvaient être bridées ? C’est totalement contre-productif, n’est-ce pas ? Et pourtant, c’est ainsi que cela fonctionne.

Alors un jour, on a cet auteur un peu innocent qui se met à écrire dans un autre genre que celui dans lequel il a déjà été publié, et qui se pointe chez un éditeur dont la ligne éditoriale correspond à son nouveau roman :

— Mais enfin, comment osez-vous ? Vous avez déjà publié du dino porn chez JurassicPornPublishing (JPP pour les intimes), si vous souhaitez que nous publiions votre dino thriller, il va falloir changer de pseudonyme, mon petit.
— J’aime bien mon nom d’auteur actuel, voyez-vous, car il s’agit de mon véritable nom.
— Dans ce cas, merci, au-revoir.

C’est presque du vécu-réel. Le dino porn mis à part. (le comique de répétition, ma spécialité) (pour ceux et celles qui me trouveraient encore trop subtile) (la subtilité, une autre de mes spécialités).

Je t’entends déjà d’ici, petit détracteur, te plaindre « Oui, mais les lecteurs ? Ils vont croire qu’ils achètent du dino porn et vont se retrouver avec un dino thriller ! »

Le lecteur est bien plus futé qu’on ne le pense… Il serait peut-être temps de lui faire confiance. Car il est aussi capable que n’importe qui de retourner le livre, lire la 4° de couverture, ce genre de choses qui ne prennent pas trop longtemps et sont de bons indicateurs du genre. Prenons un exemple tout simple :

Résumé #1
« Jonathan se réveille un jour couvert de sang, un couteau dans la main et plus aucun souvenir de la nuit passée. Il renifle l’hémoglobine sur son bras : aucun doute. Un regard par la fenêtre confirme ses craintes : des traces de pattes de T-Rex sont encore visibles dans la pelouse dévastée. Deux choix s’offrent à lui : prévenir la Brigade de Défense des Dinosaures, ou enquêter de son côté et découvrir ce qui a bien pu se produire. Une course contre la montre s’engage alors entre John et son ennemi juré : Denver, le dernier dinosaure. »

Résumé #2
« Il lui a tout donné, mais il lui a également tout pris. Kelly ne sait plus comment colmater les blessures qu’il lui a infligées au cœur et à l’âme. Elle quitte tout pour s’installer dans la propriété que sa grand-tante Philomène lui a léguée quelques mois plus tôt et qu’elle envisageait alors de vendre. Quelle n’est pas sa surprise en arrivant de découvrir que quelqu’un d’autre occupe les lieux ! Et pas n’importe qui, non, c’est son premier amour qui l’attend sur le pas de la porte, avec ses petits bras dont elle se souvient encore tellement en détail… Saura-t-elle donner une seconde chance au T-Rex qui a mangé sa jambe droite par erreur lors d’un de ses flashbacks de la Jurassic War II ? »

Attention, un détail un peu gore se cache dans le résumé de dino porn, ne tombez pas dans le piège.

Et donc, si le lecteur ne prend pas la peine de vérifier le livre qu’il achète, quel est le risque ? Oh mon Dieu ! Non ! Il pourrait découvrir un autre genre ! Lire l’auteur dans un autre genre que celui dans lequel il l’a déjà lu ! Que personne ne bouge ! Il faut empêcher cela, appelons Bruce Willis, je ne vois que lui pour éviter cette catastrophe en devenir !

La morale de cet article et simple : « Leave Britney alone ! »  Ou, en version moins drama queen : laissez les auteurs écrire dans le genre qui les inspire, arrêtez de vouloir les brider et ne lisez pas de dino porn*, en vous remerciant.

*Article sponsorisé par la FIDDDE**

**Fédération Internationale de Défense des Droits des Dinosaures Exploités

PS : tu noteras que j’ai fait un effort de mise en page. J’ai mis des trucs en gras. Et puis ça m’a gonflée et j’ai abandonné là mon envie de faire un joli article.